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- Publié le 3 mai 2018
Négocier dans les TPE, désormais possible, mais…
Négocier dans les TPE, désormais possible, mais…
La loi qui ratifie les ordonnances « Macron », relatives à la négociation collective, a été publiée au Journal officiel avec une prise d’effet au 1er janvier 2018. Elle permet à l’accord d’entreprise de primer sur l’accord de branche. Explications d’Angélique Morin, juriste en droit social au cabinet Comptafrance :
Cette réforme permet la négociation d’aménagements sociaux au sein de l’entreprise, y compris ceux qui vont dans un sens moins favorable que la convention collective dont elle dépend. Autrement dit, il est désormais possible, à certaines conditions, de s’affranchir des règles passées. « Ces assouplissements permettent d’adapter la règle sociale au monde des petites entreprises », résume Angélique Morin. Rappelons qu’en dessous de onze salariés, la négociation n’était possible qu’avec un salarié mandaté par un syndicat.
Sont notamment concernées, les entreprises de moins de onze salariés ainsi que celles comprises entre 11 et 20 salariés sans délégué syndical.
Mais attention, la négociation reste de mise. Après que la direction ait mis un sujet structurel en débat, le référendum de l’employeur doit être soumis à la majorité des deux tiers des salariés.
Même s’il s’agit d’une négociation gagnant/gagnant, difficile d’anticiper la réussite d’une telle avancée. « Tous les assouplissements devront être justifiés par le dirigeant, insiste Angelique Morin. Au cas par cas, il pourra s’agir de faire face à une difficulté passagère ou d’anticiper une évolution d’activité pour adapter les règles sociales au plus près de la réalité de l’entreprise.
Ce nouveau cadre de négociation est une révolution dans les petites structures. La procédure est à l’évidence plus simple que par le passé, puisqu’il fallait jusqu’à présent avoir recours à un salarié extérieur, mandaté par un syndicat.
La discussion avec les salariés dans les TPE restera tout de même une étape compliquée, car elle n’est pas habituelle.
L’organisation de la négociation :
- Treize thèmes parmi lesquels le salaire minimum, les classifications, les garanties collectives de prévoyance et de frais de santé ou le renouvellement des périodes d’essai… sont classés dans ce que l’on appelle le Bloc 1. Pour lui, l’accord de branche continue de primer sur l’accord d’entreprise, sauf à ce que ce dernier soit équivalent ou plus favorable.
- Quatre thèmes entrent dans le Bloc 2 : primes pour travaux dangereux ou insalubres, prévention des effets de l’exposition aux risques professionnels, insertion professionnelle des travailleurs handicapés, dispositions particulières sur les délégués syndicaux.
Pour ce bloc, si l’accord de branche prévoit qu’il doit primer sur l’accord d’entreprise, dans ce cas l’accord d’entreprise devra prévoir des garanties au moins équivalentes sur ces sujets. - Enfin, le Bloc 3 regroupe tous les autres thèmes ; pour eux, c’est l’accord d’entreprise qui prime dorénavant sur l’accord de branche. Les plus en vue concernent le contingent et les majorations d’heures supplémentaires, le repos compensateur de remplacement, les conventions de forfait jour, le montant de l’indemnité de rupture, la prime de 13ème mois, d’ancienneté ou de vacances, la durée du préavis en cas de démission…
« L’esprit de la loi est bien là, explique Angélique Morin. Permettre à l’entreprise d’adapter son organisation salariale à ses objectifs du moment, aux défis à relever, et de s’adapter pour sa performance économique ».
Quelques précautions s’imposent :
- L’employeur rédige sa proposition de projet d’accord,
- Il en remet un exemplaire à chacun des salariés,
- Il organise, au mieux quinze jours plus tard, un vote à bulletin secret,
- La ratification ne sera effective qu’après l’approbation des deux tiers du personnel.
- L’employeur dépose alors le projet à la Direccte et au secrétariat du greffe des Prud’hommes.
Notons que ces nouvelles dispositions valent, quelles que soient les dates de signature des accords de branches et d’entreprises, et pas seulement pour ceux signés après le 1er janvier 2018. Sont également concernés tous les secteurs d’activité.
On voit qu’il existe une simplification pour les TPE mais ces aménagements sont accompagnés de nombreux garde-fous. Angélique Morin tempère tout de même : « C’est aussi une façon nouvelle de trouver une solution lorsque l’entreprise rencontre des difficultés économiques passagères, peut-être pour permettre d’éviter des licenciements économiques ».